Rapport d'activité 1996-1997  

laboratoire d'annecy-le-vieux de physique des particules 

 
 

Le LAPP est l'un des 18 laboratoires de l'Institut National de Physique Nucléaire et de Physique des Particules (IN2P3), institut du CNRS qui regroupe les moyens liés à ces deux domaines de recherche, et dont il reçoit la quasi-totalité de son budget d'équipement et de fonctionnement. Le LAPP accueille également une fraction majoritaire du laboratoire de physique théorique ENSLAPP, bi-localisé à Annecy et Lyon.

Le LAPP a le statut d'Unité Mixte de Recherche (UMR) entre le CNRS et l'Université de Savoie, dans le cadre d'un contrat quadriennal.

Le LAPP compte environ 200 personnes. Sur les 150 permanents, près de 70 sont chercheurs CNRS ou enseignants-chercheurs et 80 sont des personnels techniques et administratifs. Il s'y ajoute, en équivalent temps-plein, une quarantaine de visiteurs et de doctorants (étudiants préparant une thèse). Enfin, plusieurs dizaines d'étudiants (40 à 50 selon les années, IUT, Maîtrise, Ecoles d'Ingénieurs, DEA...) séjournent chaque année au laboratoire pour des stages d'une durée de un à six mois.

PREAMBULE

Avec ses vingt ans d'existence, fêtés en juin 1996, le LAPP est un laboratoire à la fois jeune et mûr. A travers son programme expérimental qui aborde pratiquement toutes les grandes questions posées actuellement en physique des particules, il prouve que le pari de créer un laboratoire de pointe dans un site éloigné de la capitale et proche du CERN a été largement gagné.

En prenant le statut d'UMR, dans le cadre d'un Département de Recherche rattaché à la Présidence de l'Université, le LAPP a concrétisé ses liens déjà anciens avec l'Université de Savoie.

Ce rapport couvre la période 1996-1997. Il donne une description des activités du laboratoire concernant la recherche et les technologies associées, l'enseignement et la formation. Il présente l'état des structures de fonctionnement et du personnel du laboratoire fin 1997. Un lecteur curieux des détails n'y trouvera probablement pas tout ce qu'il aimerait connaître, nous l'invitons donc à prendre contact avec les responsables des activités décrites, ils auront à coeur de le satisfaire.

LES EXPERIENCES EN PRISE DE DONNEES

Au cours des deux années couvertes par ce rapport, six expériences du laboratoire ont enregistré des données. Deux expériences consacrées à l'étude des collisions e+e- auprès du LEP: ALEPH et L3, deux à la recherche des oscillations neutrinos: NOMAD et Chooz, une à la recherche du plasma de quarks et de gluons: NA50/52 et une autre à la spectroscopie hadronique: GAMS-WA102.

LES EXPERIENCES AUPRES DU LEP

Le LEP dont l'énergie vient de dépasser le seuil de production d'une paire de W, a été l'élément phare de ces deux années. Les équipes du LAPP ont eu des contributions très importantes à la fois concernant le fonctionnement et l'amélioration des appareillages et l'analyse des données.
 

Tandis que le groupe s'acquittait de nombreuses tâches d'intérêt général pour l'expérience, il s'est concentré, pour ce qui est de la physique et de l'analyse des données, sur les problèmes relatifs au modèle standard et au-delà, sur la spectroscopie du b et sur les tests de QCD. Le groupe a assuré une participation déterminante à la mise en oeuvre et à l'exploitation du EGAP ainsi que la responsabilité du système de déclenchement de deuxième niveau de l'expérience. Pour ce qui est de la physique il s'est investi dans l'étude des états finals hadroniques, les tests de QCD ainsi que dans la recherche de particules supersymétriques. Le groupe participe au programme de calcul automatique des diagrammes de Feynmann.

LES NEUTRINOS

Une masse non nulle de cette particule pourrait être mise en évidence par la détection d'oscillations entre neutrinos de familles différentes. Traquées depuis déjà longtemps ces oscillations n'ont toujours pas été trouvées. Les expériences NOMAD et Chooz poursuivent cette recherche.

La recherche d'oscillations neutrinos auprès de la centrale nucléaire de Chooz, dans les Ardennes, est la suite naturelle des expériences précédement entreprises par le LAPP auprès de la centrale du Bugey. L'expérience, après avoir surmonté en un temps record des difficultés imprévues, a réussi à enregistrer des données fiables avec une statistique suffisante pour conclure avec la sensibilité prévue initialement. Le neutrino n'oscille encore pas contrairement à certaines attentes, mais le résultat a apporté une pièce solide à la compréhension des propriétés de cette particule décidément bien imprévisible. Depuis fin 1997, la participation du LAPP à cette expérience est terminée. C'est dans un faisceau de numu du CERN que l'expérience NOMAD recherche l'oscillation. L'équipe du LAPP a pris en charge la construction du détecteur de radiation de transition à tubes proportionnels qui joue un rôle critique dans l'identification des électrons. La réussite est complète avec un détecteur permettant d'obtenir un facteur 1000 de réjection électron/pion. Cet appareil réalisé, le groupe a pris d'importantes responsabilités dans l'analyse des données et dans le software de l'expérience. L'expérience Nomad continuera à enregistrer des données durant 1998, l'analyse est en cours et les résultats attendus avec impatience par notre communauté.

PLASMA DE QUARKS ET GLUONS

Les expériences NA50 et NA52 poursuivent la quête du plasma de quarks et gluons en essayant de mettre en évidence les effets du déconfinement des quarks prévus dans ce plasma. La forte anomalie observée antérieurement dans la production du J/Psi est confirmée dans les collisions Pb-Pb par l'expérience NA50. Celle-ci va poursuivre ses prises de données en 1998. Certains modèles permettent de penser que ce phénomène est dû à la formation du plasma attendu. L'expérience NA52 a obtenu une limite supérieure de 3 10-10 étrangelet/interaction dans les collisions d'ions lourds étudiées en 1994 et 1995. Pour ce qui concerne le LAPP, cette expérience est maintenant terminée.

SPECTROSCOPIE HADRONIQUE

L'expérience WA102, qui s'est terminée en août 1996, a été la suite naturelle du travail du groupe qui menait les expériences GAMS. Le détecteur GAMS 4000 a été installé en complément de détecteurs implantés dans le système OMEGA du CERN. Cette expérience a mis en évidence des structures qui, pour certaines, peuvent être interprétées comme états exotiques du type glueball.

LES EXPERIENCES EN PREPARATION

La moitié du potentiel technique du laboratoire affecté directement aux expériences travaille actuellement sur ATLAS et CMS en relevant le défi de réaliser un travail qui verra son épanouissement final avec la mise en service du LHC en 2005. L'autre moitié travaille avec des échéances plus proches sur les expériences BABAR, AMS et VIRGO.

L'étude de la violation de CP présente un caractère essentiel dans la mesure où elle doit fournir une meilleure compréhension de l'asymétrie entre matière et antimatière observée dans l'univers. En réalisant une mesure précise des éléments de la matrice CKM dans le système  B0B0 bar  on est dans une situation particulièrement favorable pour tester le triangle d'unitarité.

Le groupe du LAPP a participé à l'optimisation du collisionneur de SLAC en construisant et en opérant sur l'accélérateur un calorimètre de CsI permettant d'optimiser son bruit de fond. Il a aussi pris la responsabilité du système de gaz de l'expérience. Ce système est maintenant en phase de construction. L'expérience va pouvoir enregistrer des données utilisables pour la physique au début 1999 comme prévu initialement.

De nouveau, pour cette expérience, la préocupation est le problème de la présence d'antimatière dans l'univers. Le but premier est de mesurer directement la composante d'antimatière du rayonnement cosmique en plaçant un spectromètre magnétique sur la station orbitale Alpha. L'expérience se déroulera en deux phases dont, pour ce qui concerne l'équipe française, seule la première est approuvée et financée par l'IN2P3:

- Un premier vol se fera dans la navette Discovery fin mai 1998. En plaçant un détecteur assez semblable à l'instrument final sur une orbite comparable a celle de la future station Alpha, il permettra de mesurer les bruits de fond, de tester l'appareillage et de probablement réaliser une première moisson de résultats concernant le rayonnement cosmique.

- Dans une deuxième phase prévue en 2003, l'appareil final sera installé sur la station spatiale Alpha où il prendra des données pendant plusieurs années.

En 1997 le groupe du LAPP a réalisé un détecteur à aérogel qui est, au moment où ces lignes sont écrites, installé dans l'ensemble du spectromètre AMS et testé sur la base de lancement.

La détection des ondes gravitationnelles est un défi posé aux physiciens depuis maintenant 80 ans, VIRGO relève ce défi. Avec les technologies actuelles, poussées à leurs limites, une première détection semble enfin à la portée des expérimentateurs.

La collaboration franco-italienne VIRGO (CNRS-INFN) est en phase de construction à Cascina, près de Pise. Le détecteur, un interféromètre de Michelson très sophistiqué, de 3Km de bras, sera opérationnel en 2001, sensiblement en même temps que le détecteur américain équivalent LIGO.

Le groupe du LAPP a pris en charge la construction des tours, de l'ensemble de détection du signal, et du système de calibration du détecteur. Il contribue de façon déterminante au logiciel d'acquisition des données et de simulation de l'expérience.

La recherche du boson de Higgs, motivation principale pour la construction du LHC, est le moteur de cette action de longue haleine qui doit s'épanouir en 2005. L'enjeu est grand, les expériences et les collaborations le sont aussi. Le LAPP est résolument tourné vers ce futur qui, outre le boson de Higgs, va ouvrir des possibilités nouvelles telles que la recherche de particules supersymétriques dans des domaines encore vierges ou tout simplement l'exploration de l'inconnu avec le côté exaltant qu'il représente.

Le LAPP participe aux expériences ATLAS et CMS. Dans les deux cas la contribution du laboratoire porte de façon principale sur la calorimétrie électromagnétique et les groupes de chercheurs sont importants. D'ores et déjà la moitié du potentiel technique du laboratoire, non affecté à des tâches d'intérêt général, est affecté aux expériences ATLAS et CMS avec une priorité donnée à ATLAS.

Le groupe ATLAS a pris des responsabilités importantes dans la mécanique, l'électronique et l'informatique liées au calorimètre. En 1997 le LAPP s'est doté des infrastructures nécessaires au pliage d'électrodes, à l'assemblage, câblage et tests à chaud et à la température de l'Argon liquide des 16 modules que comporte un 1/2 tonneau, c'est-à-dire la moitié du calorimètre électro-magnétique central de l'expérience. Ce travail de montages et de tests à froid débutera en 1998.

Le groupe CMS, quant à lui, conçoit et construit un banc prototype de tests des cristaux du calorimètre électromagnétique ; il participe aussi à l'électronique et à l'informatique associée.

LES SERVICES TECHNIQUES

Le programme scientifique du laboratoire ne pourrait être ce qu'il est sans l'effort très remarquable des services techniques du laboratoire. De par le faible ratio technicien/chercheur du laboratoire il se trouve que ces services sont sollicités à la limite de leurs possibilités eu égard au type de recherche que le LAPP poursuit. C'est un souhait de tous que les moyens soient donnés au laboratoire afin qu'il puisse continuer sa mission dans de bonnes conditions.

Sur la période écoulée le service informatique a complètement réorganisé le parc de machines et mis en oeuvre l'Ethernet à 100 Mbits. Les mécaniciens se sont engagés dans des réalisations en propreté contrôlée dans le cadre de projets internationaux gérés suivant des plans qualité. Les électroniciens ont acquis une bonne maîtrise en microélectronique analogique et ont réalisé des cartes logiques complexes préalablement simulées avec le logiciel VHDL. Enfin les administratifs ont fait le grand saut en passant au logiciel XLAB en janvier 1997.

Les formations suivies par les agents pour se perfectionner dans les techniques d'instrumentation ou de gestion de projets, dans l'emploi des logiciels de CAO électronique et mécanique, de comptabilité et de bureautique ont permis d'assurer et d'optimiser la haute technicité indispensable au succès des réalisations pointues entreprises par les équipes.

LA PHYSIQUE THEORIQUE

La présence du groupe de physique théorique du LAPP est un atout majeur du laboratoire. Ce groupe qui appartient au laboratoire ENSLAPP, localisé au LAPP et à l'École Normale Supérieure de Lyon, aborde la phénoménologie de la physique des particules, l'astrophysique et les problèmes plus formels de physique théorique où la supersymétrie se distingue comme préoccupation très forte partagée avec les expérimentateurs. Des échanges fructueux et permanents ont lieu entre expérimentateurs et théoriciens du laboratoire. En plus des avancées en physique théorique, c'est un enrichissement mutuel qui se produit et profite à tous.

Le groupe de physique théorique va, dès 1998, changer de statut, mais son impact à la fois sur le LAPP et sur l'Université de Savoie, où ses chercheurs prodiguent de nombreuses tâches d'enseignement, restera tout aussi profond.

AUTRES ACTIVITES

La vocation première du LAPP est la recherche fondamentale. Beaucoup de chercheurs, d'enseignants-chercheurs et de membres du personnel technique du laboratoire consacrent néanmoins une part importante de leur activité à l'enseignement et à la formation des jeunes, soit par un enseignement effectué au LAPP, à l'université, à l'IUT, ou à l'ESIA, soit dans le cadre des formations par la recherche au cours des multiples stages effectués au LAPP non seulement dans le cadre des DEA de physique des particules ou de physique instrumentale, mais aussi dans celui des stages de formation d'élèves d'écoles d'Ingénieurs, d'IUT, de maitrise et de BTS. On trouvera dans ce rapport la liste des thèses qui ont été soutenues au laboratoire ces deux dernières années.

Un accent important a été mis sur la communication avec le monde extérieur à la recherche. A l'occasion de la fête des 20 ans du laboratoire, une opération portes ouvertes a eu un succès remarquable en ligne avec celui de la première fête de la science organisée en 1994. L'interaction du laboratoire avec le tissu local s'est maintenue à travers la participation à des expositions et foires locales.

A la série des séminaires scientifiques destinés aux chercheurs s'est ajoutée une série de séminaires et de projections "tous publics" s'adressant à tout le personnel et ouverte au public.

Le LAPP se porte bien et regarde vers l'avenir avec optimisme, la lecture plus avant de ce rapport vous le confirmera.

Nous remercions particulièrement N. Berger et D. Duchesneau qui ont consacré beaucoup d'efforts à la mise en état de ce rapport.
 

René Morand  - Sous Directeur                                                                           Michel Yvert - Directeur